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La lutte contre la pollution dans les grandes villes guinéennes

La lutte contre la pollution dans les grandes villes guinéennes

La lutte contre la pollution dans les grandes villes guinéennes

La pollution urbaine : un fléau discret mais omniprésent

À Conakry, comme dans de nombreuses grandes villes guinéennes, respirer à pleins poumons est devenu un luxe. Les gaz d’échappement, les déchets non ramassés, les eaux stagnantes ou encore les fumées issues des décharges improvisées participent à un cocktail polluant qui altère la qualité de l’air, de l’eau et de la vie elle-même.

Il suffit d’une promenade matinale sur l’axe Hamdallaye-Ratoma pour être frappé par la densité de la fumée qui s’élève des tas d’ordures brûlés en plein cœur des quartiers. À cela s’ajoutent les klaxons incessants des motos-taxis et la poussière soulevée par les taxis collectifs, souvent en piteux état mécanique.

Mais cette pollution dont on parle si peu a des conséquences lourdes : maladies respiratoires fréquentes, baisse de la qualité de vie, nuisance sonore, dégradation des infrastructures et, plus insidieusement, démotivation touristique. Car qui veut visiter une ville où l’on suffoque ?

Comprendre les causes pour mieux agir

La pollution en milieu urbain en Guinée ne provient pas d’une source unique. Elle résulte d’un enchevêtrement de facteurs dont l’analyse permet d’entrevoir des solutions réalistes.

Des conséquences visibles mais sous-estimées

En Guinée, la pollution des grandes villes est considérée comme un dommage collatéral du développement. Pourtant, ses effets se font sentir chaque jour, en silence.

Les médecins généralistes à Conakry confirment une hausse des cas d’asthme, de bronchites chroniques et d’allergies respiratoires, notamment chez les enfants. Amadou Sow, pédiatre à l’hôpital Donka, déclare : « La qualité de l’air est un facteur que nous ne prenons pas assez en compte, pourtant nombre de pathologies pédiatriques y sont liées directemment. »

De son côté, Fatoumata, une étudiante en informatique vivant à Matoto, partage : « En saison sèche, la poussière est insoutenable. Je suis obligée de porter un masque, non pour la COVID, mais pour réussir à respirer. »

À cela s’ajoute la dégradation de l’image des villes guinéennes auprès des touristes et investisseurs. Les visiteurs s’étonnent souvent de l’absence de dispositifs de gestion des déchets dans les rues. Un guide touristique local sourit, amer : « On vend la beauté naturelle du pays, mais nos villes n’ont pas fière allure. »

Des initiatives locales en quête de soutien

Malgré un panorama difficile, des citoyens et associations tentent de reprendre le pouvoir sur leur environnement. Certaines communes lancent des campagnes de nettoyages mensuels ou de reboisement urbain, mais celles-ci manquent souvent de moyens.

Certaines jeunes start-ups, à l’image de “GreenGuinée”, expérimentent la collecte de plastique dans les quartiers périphériques de Conakry pour les recycler en pavés de construction. Le fondateur, Mamadou Bah, explique : « On produit plus de 200 kg de déchets plastiques par jour dans certains quartiers. Ce n’est pas un problème, c’est une opportunité si c’est bien géré. »

D’autres projets, comme celui de l’ONG « Conakry Ville Propre », incitent à la création de mini-centres de tri communautaires. Mais ils peinent à perdurer, par manque de financements et de cadre réglementaire adéquat.

Le rôle crucial de l’État et des collectivités

La lutte contre la pollution en zone urbaine ne peut reposer uniquement sur des actions citoyennes. L’État doit jouer son rôle de facilitateur, voire de moteur.

Des villes comme Kigali (Rwanda) ont montré qu’en combinant volonté politique, réglementation claire et sensibilisation de masse, des transformations spectaculaires sont possibles. Alors pourquoi pas Conakry, Kindia ou Labé ?

Impliquer les citoyens au cœur du changement

La lutte contre la pollution urbaine ne serait efficace sans une implication directe des populations. Les comportements individuels ont un impact collectif.

Jeter ses déchets dans une poubelle, éviter de brûler des ordures, planter un arbre devant chez soi, participer aux journées de nettoyage… chaque geste, bien que symbolique, participe à construire un nouvel imaginaire écologique.

De plus, les technologies numériques offrent aujourd’hui des leviers inédits : applications de signalement d’encombrants, groupes de citoyens engagés sur les réseaux sociaux, plateformes de financement participatif pour des projets de nettoyage urbain… Les opportunités sont là, reste à les saisir.

Et le tourisme dans tout ça ?

Dans un pays aussi riche en patrimoine naturel et culturel, la pollution urbaine peut sembler n’être qu’un détail. Mais les touristes, eux, ne s’y trompent pas. Une ville propre est souvent la première vitrine du pays. Elle donne le ton sur le soin porté à l’environnement, à la qualité de vie et au respect des normes sanitaires.

Pour booster l’image du pays à l’international, il serait judicieux d’investir également dans l’esthétique urbaine : peintures murales, fresques, bacs à plantes, mobilier propre. Pourquoi ne pas créer des circuits touristiques mettant à l’honneur les quartiers “zéro-déchets” ou les espaces verts bien entretenus ?

Regard vers l’avenir : osons une ville respirable

Et si la prochaine ambition urbaine de Conakry était de devenir une ville pilote en gestion durable ? Ce rêve peut sembler lointain, mais chaque rue nettoyée, chaque moteur polluant remplacé, chaque enfant sensibilisé nous en rapproche un peu plus.

La lutte contre la pollution dans nos villes est un travail de tous les jours, une synergie entre les institutions, les citoyens et les entreprises. C’est une question d’habitudes, de coordination et de volonté politique.

Car au final, la véritable question à se poser est : dans quelle ville voulons-nous vivre d’ici dix ans ? Une ville que l’on fuit, ou une ville que l’on respire ?

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